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Louise Michel, « Viro major »

26 Avr 2021

Cette année 2021 commémore deux grands évènements de l’histoire de France, Napoléon et les 150 ans de la Commune. Nous ne mettons pas sur le même plan ces deux commémorations, notre préférence allant pour la deuxième.

Ce n’est pas un choix par concession à la cancel culture du moment, l’Histoire étant un bloc qu’il faut prendre dans sa totalité, mais parce que les 72 jours de la Commune ouvrent une ère politique républicaine en continuité des projets de la Grande Révolution.

Une figure particulière retient notre attention : Louise Michel, née le 29 mai 1830 au château de Vroncourt, est pour nous porteuse de nos ambitions et de nos combats actuels pour l’émancipation humaine.

L’institutrice

La première dimension de Louise Michel est son engagement pour l’instruction. Elle se consacre au métier d’institutrice, non pas au sens de l’école de Ferry, mais néanmoins avec la même idée émancipatrice : instruire le peuple. De par ses origines, elle est la fille née hors mariage du fils du châtelain, Laurent Demahis, et de la servante Marianne Michel, et est élevée par ses grands-parents paternels. Elle reçoit de ce fait une instruction classique et une éducation libérale, elle lit Voltaire et Rousseau. Cette bonne instruction reçue dans sa jeunesse l’accompagnera tout au long de sa vie et sera un ferment de sa révolte et de son engagement. Il y a chez elle une soif d’apprendre, ce qui l’amène à suivre les cours du soir pour préparer le baccalauréat à la Société d’Éducation populaire de la rue Hautefeuille, organisée par des républicains comme Jules Favre, Eugène Pelletan et Jules Simon. Déjà avant la République, ils avaient compris l’importance de l’instruction. Louise Michel s’intéresse aux domaines les plus modernes du savoir de son époque, elle lit Darwin et Claude Bernard et fréquente le groupe du Droit des Femmes animé par Mme Jules Simon, André Léo et Maria Deraismes. À cette période, elle fait la connaissance de Jules Vallès, Eugène Varlin, Rigault, Eudes, un blanquiste notaire. Cette période de formation sera aussi celle de sa mue politique, quittant une culture catholique qui correspondait à son caractère altruiste pour un engagement plus politique et anarchiste qu’elle accentuera au contact de sa compagne de déportation, communarde comme elle, Nathalie Lemel.

L’écrivaine

L’autre aspect de sa vie qui nous importe concerne ses qualités littéraires. Louise Michel est une grande écrivaine et c’est un aspect trop souvent occulté de sa vie, en particulier par la propagande de la bourgeoise qui a tremblé et tremble encore de ce peuple qui demandait des droits politiques et sociaux. Cette bourgeoisie qui avait prospéré sous la Restauration et le second Empire la traitera de « Vierge Rouge », d’« Incendiaire en Chef », et réussira à effacer pour longtemps cette dimension qui nous intéresse.

Louise Michel aura comme modèle Victor Hugo avec qui elle sera en contact pendant plus de trente ans et qui lui dédie, au moment de sa condamnation à la déportation perpétuelle en Nouvelle Calédonie où elle reste jusqu’en 1880, un poème intitulé Viro Major, (littéralement “plus grande qu’un homme”).

 

Un livre parmi sa production illustre parfaitement son talent d’écrivain, La Chasse aux loups dont on avait perdu la trace depuis 1891 : c’est un roman bref, violent, frénétique, dominé par cette chasse infernale, une chasse aux hommes qui agglutine la fiction, l’Histoire, l’actualité, et les grands mythes. Louise Michel, est alors en exil londonien depuis 1890, elle rêve ainsi le retour du « spectre de mai », de la révolte des chassés contre les chasseurs. Ce livre est un aboutissement de sa création romanesque, il compose un nouveau Quatrevingt-treize, ce roman de Hugo qui, ne l’oublions pas, influencera plus d’un auteur, en particulier Vallès.

La dimension littéraire de Louise Michel doit être redécouverte, une production importante de plus d’une vingtaine de titres, articulée à son action politique et de militante pour l’émancipation du peuple, des femmes, et pour cet idéal d’autonomie et de liberté dont elle se fit le héraut.

C’est une grande figure de la lutte pour la liberté humaine dont notre mémoire garde le souvenir, une figure aux multiples ramifications de questions encore d’actualité.

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