Sciences et pseudo-sciences
Note de lecture :
Sciences et pseudo-sciences
Regards des sciences humaines
Ouvrage collectif
Sous la direction de Valéry Rasplus*
Editions Matériologiques** (octobre 2014)
Un titre bigrement alléchant, des signatures de qualité, voici deux bons ingrédients pour ravir les neurones de tous ceux et toutes celles qui s’intéressent à ce conflit, quelque peu sempiternel, entre les rationalistes pur jus et les spiritualistes bon teint, pas toujours sympathiques, qui adorent surfer sur leurs intuitions mystiques.
Louons le coordinateur des auteurs, Valéry Rasplus, d’avoir su prendre toute la mesure de la contradiction, c’est-à-dire les fortes oppositions entre les uns et les autres. Il signe la première étude et nous invite, dans sa conclusion, à considérer : « Quand les sciences tendent dans leur démarche à faire preuve d’objectivité (regard critique perpétuel, collectif et impersonnel), de rigueur (multi-contrôles), de remise en question (évaluation anonyme par les pairs), les para-sciences et les pseudo-sciences parodient les méthodes scientifiques en baignant dans un monde élastique où – maux récurrents – tout devient possible, tout est facile, sans contraintes, souvent à partir de rien. Les fantaisies prennent corps et la science-fiction se positionne comme «science» ». Tout est dit ou presque et nous pourrions nous en arrêter là. Mais pour vous, amis lecteurs, et pour les rédacteurs de cet ouvrage, cela ne saurait suffire.
A l’instar d’un objet que l’on manipule dans tous les sens, chaque intervenant aborde le thème sous un angle spécifique ce qui rend intéressant cette mise en valeur des différences d’approche. Oui, comme l’affirme Régis Meyran « l’ésotérisme contribue à alimenter le relativisme scientifique ». Oui, comme l’écrit Dominique Lecourt, l’astrologie « implique l’idée d’un destin qui résorbe le hasard dans la fatalité. Mais elle n’exclut pas qu’on puisse négocier avec lui,par une manière de «connivence essentielle» de l’être humain avec le cosmos ». Oui, Alexandre Moatti n’hésite pas à considérer que « les créationnistes contemporains ne font que s’adapter à l’avancée de la connaissance scientifique (théorie du Big-bang), en transposant dans le domaine de l’astrophysique des arguments émis au XIXe siècle dans le domaine de la géologie… ». Oui, quitte à rester des adversaires résolus de tous les amateurs d’irrationalisme, tout libre penseur normalement constitué ne peut que s’associer à cette démarche intellectuelle des neufs auteurs. Toutefois, avec cette différence de taille : nous n’appartenons pas à ce groupe d’éminents chercheurs universitaires qui usent leurs blouses blanches afin de contribuer à l’évolution des connaissances.
Du bel ouvrage qui s’ingénie à repousser les zones incertaines dans lesquelles les gourous se complaisent et entraînent nombre de quidams qui rêvent en croyant, dur comme fer, en leurs sornettes de mondes à jamais obscurs où tout et son contraire cohabitent. Par ce fait, ce livre a de quoi faire enrager tous ces petits maîtres à penser. La vraie lumière ne franchira jamais leur porte. Manichéisme oblige : il faut choisir son camp. Et, pas de doute : pour moi, il reste celui qui nous pousse à cet ouverture d’esprit vers ce qui reste à découvrir et à comprendre scientifiquement.
Merci aux auteurs pour ce passionnant vagabondage dans leurs recherches sur la méthode et pour leur remise à l’équerre des différences fondamentales qui les opposent à l’irrationalisme. Ce livre reste une belle invitation. Non pas sur ce qui est bien ou mal, ce qui en soi ne veut rien dire, mais sur un processus intellectuel exempt d’à-priori et surtout d’approximations. A lire de toute évidence !
Roland BOSDEVEIX
* Raymond Boudon, Gérald Bronner, Pascal Engel, Nicolas Gauvrit, Dominique Lecourt, Régis Meyran , Alexandre Moatti, Romy Sauvayre.
** A commander chez l’éditeur : Editions Matériologiques, 233 rue de Crimée 75019 Paris; http://materiologiques.com
2 versions possibles de l’ouvrage : papier ou numérique.
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