Billet de mauvaise humeur
Ce que nous dit l’ « Affaire Benalla » de notre République
ou:
Benalla est grand et Macromet est son prophète…
Je renonce à traiter de l’affaire Benalla dans le cadre du « Ramasse-miettes ».
C’était finalement une bonne chose que l’affaire Benalla éclate pendant une période où je me trouvais dans l’impossibilité de traiter l’info à travers ma revue de presse hebdomadaire.
Il faut dire que l’affaire en question est tellement… euh ? Plastique ? Que la suivre pas à pas aurait entièrement phagocyté la chronique. Entre les cris d’orfraie des uns, les dénégations alambiquées des autres et l’indignation de tous : qui pour trouver l’affaire scandaleuse, que cet autre trouve scandaleuse aussi, mais pour des raisons diamétralement opposées, mère laie ne retrouve pas ses ragots.
Alors pourquoi en parler ? Pourquoi en effet ? Mais tout simplement parce que ce qui nous intéresse c’est ce que tout cela dit de notre République.
L’affaire Benalla souligne jusqu’à la caricature la tare originelle de la Constitution de la VèRépublique qui en fait en vérité une monarchie élective, avec tous les vices qui s’attachent à une monarchie permettant la concentration entre les mains d’un seul de pouvoirs proprement exorbitants.
L’une des caractéristiques d’un tel régime est « l’effet de cour », déjà vigoureusement dénoncé sous De Gaulle – souvenons-nous de la chronique « La Cour » du Canard Enchaînéqui ne s’y était pas trompé. Physiquement la cour consiste en une structure de cercles concentriques où l’on est écouté et puissant en fonction de la mesure du rayon qui sépare du potentat : plus il est court plus grande est l’influence, c’est l’effet de cour. Deuxième caractéristique de la cour, on cherche à plaire au grand chef, par tous les moyens de la flagornerie, de la servilité et, le pire de tous, en cherchant à anticiper les désirs de l’idole. Si on se trompe ce n’est pas très grave car aussi longtemps que la grâce du chef exerce sa bienveillance, on est in-tou-cha-ble. Bref c’est l’impunité assurée, Benalla en est le triste exemple.
Finalement rattrapé par la diffusion de vidéos qui le montrent, en compagnie d’un autre mercenaire, à l’œuvre sous le regard complice ou pour le moins indifférent de vrais flics, tabasser d’abord une manifestante, puis un homme déjà à mis terre par d’autres. Résultat, 15 jours de mise à pied – qu’il n’a probablement pas faits, et la cacophonie que l’on sait, prenant à contre-pied un pouvoir durablement effarouché.
Chez les énamourés de Macron c’est : « Touche pas à mon Manu » et « Circulez ! Y a rien à voir », jusqu’à ce que, devant une partie de la majorité parlementaire et des ministres de La République en marche (LRM), invités à la soirée organisée par le parti à l’occasion de la fin de la session parlementaire à la Maison de l’Amérique latine, Emmanuel Macron qualifie cette affaire de « déception » et de « trahison », selon des propos rapportés par des députés présents, et dont BFM-TV fournit une retranscription presque intégrale :
Verbatim : « S’ils cherchent un responsable, le seul responsable, c’est moi et moi seul. C’est moi qui ai fait confiance à Alexandre Benalla. C’est moi qui ai confirmé la sanction. Ça n’est pas la république des fusibles, la république de la haine. On ne peut pas être chef par beau temps. S’ils veulent un responsable, il est devant vous. Qu’ils viennent le chercher. Je réponds au peuple français. »
C’est qui ILS ? Les Français ? Le peuple français ? Admirons au passage la nuance… Mais retenons le « c’est moi, c’est moi seul ». Quelle arrogance ! Il y a là-dedans du « Allez vous faire voir, je suis votre chef – il l’a déjà dit aux militaires – ou venez me prendre ». La cour de récré n’est plus très loin.
De tout cela il ressort que le seul « patron » c’est Macron, que la res publica n’est plus que le cache-misère de la res potesta, ultime avatar d’une VèRépublique à bout de souffle.
À quand la convocation d’une Constituante ?
Gilles Poulet
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